Kyste pilonidal ou kyste sacro-coccygien ou sinus pilonidal

Le kyste sacro-coccygien est une pathologie liée à la Chirurgie Proctologique

Introduction

Le kyste pilonidal (ou kyste sacro-coccygien ou sinus pilonidal) est une pathologie bénigne et fréquente du sillon inter-fessier touchant essentiellement les adolescents et les jeunes adultes. Elle se manifeste par des douleurs, des infections ou une suppuration. Le traitement historique reposait sur l’exérèse radicale du kyste. Cette intervention simple techniquement mais très mutilante pour le patient, est responsable de douleurs, d’une interruption d’activité prolongée, et nécessite des soins complexes quotidiens pour permettre la cicatrisation. Aujourd’hui, les techniques mini-invasives doivent être privilégiées, notamment le traitement par laser.

 

Histoire de la maladie 

Le kyste pilonidal est lié à la pénétration de corps étrangers (poils ou cheveux) sous la peau du sillon inter-fessier, ce qui va occasionner une inflammation locale, puis des surinfections. Une coque cicatricielle (granulome) se forme autour du corps étranger. Au gré des infections, le kyste peut s’étendre vers les tissus graisseux des fesses ou du bas du dos (fistule)

Les facteurs favorisants sont clairement identifiés : 

  • le tabac est le principal facteur de risque pour la formation du kyste et pour sa surinfection. L’éviction du tabac est un pré-requis pour envisager une guérison complète et durable de la maladie.
  • le surpoids et l’obésité
  • la macération et les défauts d’hygiène
  • la position assise prolongée, la sédentarité
  • la présence d’une fossette congénitale : il s’agit d’un défaut de fermeture de la peau au niveau du sillon inter-fessier, facilitant l’entrée des poils sous la peau.

Une fois formé, le kyste, colonisé par les germes de la peau et de la sphère anale, va s’infecter à répétition. La survenue d’une infection et le rythme des surinfections n’est pas prévisible, sauf circonstances particulièrement à risque (ex : long trajet en voiture en période de grande chaleur).

 

Les manifestations cliniques

  • L’abcès : les patients consultent le plus souvent pour un abcès du pli inter-fessier. Il s’agit d’une « boule » douloureuse et rouge, rendant la position assise difficile voire impossible. C’est une urgence qui nécessite un avis médical ou auprès d’un chirurgien dans la journée. Une incision de l’abcès est souvent nécessaire pour soulager le patient. Si l’abcès est débutant, un traitement médical est privilégié : applications d’antiseptiques locaux, voire une antibiothérapie orale
  • Les douleurs isolées : certains patients présentent des crises inflammatoires à répétition, qui se résolvent sans traitement, parfois avec l’évacuation spontanée de pus. 
  • Les suppurations : En cas de fistule avec orifice large, un suintement chronique peut se produire. Ce phénomène peut générer un inconfort : sensation d’humidité permanente, peau hypersensible, démangeaisons, mauvaise odeur.
  • La découverte fortuite : à l’occasion d’un examen clinique, ou simplement lors de la toilette, un kyste peut être découvert alors qu’il ne s’est jamais infecté. L’aspect typique est celui d’un ou plusieurs petits orifices au niveau du sillon inter-fessier, dans lesquels on peut voir parfois des poils. Il s’agit du ou des orifices par lesquels les corps étrangers sont passés sous la peau. A la palpation, on peut ressentir une induration, correspondant aux corps étrangers eux mêmes, ou à la coque cicatricielle qui s’est formée autour. Enfin, certains patients présentent un ou plusieurs orifices sur  un coté du sillon inter-fessier, ou dans le bas du dos : il s’agit de l’évacuation d’une fistule. Cet orifice est souvent induré ou en relief. 

  • Les saignements : En cas de fistule, l’inflammation de la peau peut occasionner des saignements par 2 mécanismes :
  • l’évacuation spontanée d’un abcès  provoque une « fissuration » de la peau, le saignement est alors bref et s’arrête jusqu’à la crise suivante.
  • l’inflammation chronique fait multiplier les petits vaisseaux sanguins sous la forme d’une lésions en relief, appelée botryomycome. Cette lésion peut saigner à chaque traumatisme local.

 

S'agit-il vraiment d'un kyste pilonidal? 

Le kyste pilonidal est une pathologie fréquente et assez facile à diagnostiquer. Néanmoins d’autres situations peuvent mimer un kyste pilonidal: 

  • Une simple fossette : c’est un défaut de fermeture cutanée, présent dès la naissance. Il ne s’agit pas d’une maladie, et il n’y a pas de raison de proposer un traitement. Néanmoins les mesures d’hygiène locale doivent respectées pour éviter que des poils s’accumulent dans la fossette, et ne forment secondairement un kyste.
  • Les douleurs coccygiennes : elles peuvent se produire après un traumatisme du coccyx (chute sur les fesses) ou en cas d’anomalie sur les os et les ligaments de cet ensemble osseux. La douleur coccygienne est déclenchée en cas de position assise ou aux changements de position. 
  • La maladie de Verneuil (hidradénite suppurative) : c’est une maladie fréquente de la peau au niveau des plis, aboutissant à des inflammations récurrentes voire des abcès. 

 

Le traitement en cas d'infection aigüe

Les soins locaux

En cas d’inflammation locale ou d’abcès débutant, le traitement repose sur les soins locaux : bonne hygiène locale, application de compresses d’antiseptique (biseptine, alcool, bétadine, hexdomedine etc) à changer plusieurs fois par jour. En l’absence d’amélioration, une incision de l’abcès sera vraisemblablement nécessaire. Un avis est à demander en urgence.

Un antibiotique pour mon kyste?

La prescription d’antibiotiques pour une infection de kyste pilonidal est trop souvent systématique. L’application d’antiseptiques locaux (pansement alcoolisé, biseptine, betadine, hexomedine etc) est souvent suffisante pour traiter un abcès débutant. En cas d’infection plus avancée, une antibiothérapie est parfois nécessaire. Plusieurs études sur la bactériologie des kystes pilonidaux montrent que les germes responsables d’une infection sont très variables, et correspondent à des germes digestifs le plus fréquemment. Une antibiothérapie de large spectre est donc à privilégier (de type Amoxicilline + acide clavulanique, Augmentin). L’étude PILOBAC menée dans notre centre montre qu’un traitement antibiotique visant les Staphylocoques (Pyostacine, Fucidine) n’est pas actif sur les germes du kyste dans 2 cas sur 3.

Une opération en urgence

L’intervention réalisée en urgence pour un abcès n’a pour but que de traiter l’infection et de soulager les douleurs du patient. Le kyste en lui même ne sera pas traité. Il s’agit donc d’inciser l’abcès et nettoyer le kyste. Cette intervention est réalisée sous une brève anesthésie générale. L’anesthésie locale n’est pas adaptée dans cette situation car les anesthésiques locaux ne sont habituellement pas efficaces sur la peau inflammatoire. Le cas échéant, le geste risque d’être très douloureux, et le geste chirurgical probablement pas optimal, ce qui est à risque de récidive rapide de l’infection.

Après l’intervention, des soins locaux sont nécessaires quotidiennement pour diriger la cicatrisation. Avant le passage de l’infirmière à domicile, le patient prend une douche sans pansement et lave la plaie abondamment. L’infirmière réalise un lavage de la plaie au sérum physiologique, retire les poils pouvant se trouver sur la plaie, et appose une compresse absorbante appelée mèche dans la plaie, avant de recouvrir par un pansement. Les soins sont parfois douloureux les premiers jours, un traitement antalgique oral doit être pris 15 minutes avant le passage de l’infirmière. La durée des soins dure de 2 à 4 semaines. Le tabagisme allonge grandement le temps de cicatrisation.

 

Le traitement à distance d'une infection

La chirurgie programmée d’un kyste pilonidal a pour but d’éviter la formation d’un abcès et/ou de supprimer une gêne chronique. La chirurgie jour un rôle majeur, mais elle n’a d’intérêt que si les facteurs de risque de la maladie sont controlés. 

1/ les règles hygiéno-diététiques

Il s’agit probablement de la partie la plus importante du traitement. Sans le respect de ces règles, le risque de récidive est majeur après chirurgie. 

  • Bonne hygiène locale : une douche par jour, en insistant au moins 30 secondes sur le sillon inter-fessier, pour éviter que des poils ou cheveux stagnent au niveau du sillon et ne s’infiltrent sous la peau. Bien sécher après chaque douche.
  • Arrêt du tabac. Les effets néfastes du tabac sont bien connus au niveau de la peau, que ce soit sur les capacités de cicatrisation, ou l’incidence de phénomènes infectieux. Le tabac est un facteur de risque majeur de formation de kyste pilonidal, de surinfection du kyste, de complication après chirurgie, d’échec de la chirurgie, et de récidive du kyste. L’arrêt du tabac complet et définitif doit être envisagé. Des solutions existent pour vous accompagner dans l’arrêt du tabac. Demandez conseil à votre médecin ou consultez https://www.tabac-info-service.fr
  • Limiter les situations à risque : levez vous régulièrement si vous avez une activité sédentaire, prévoyez de pouvoir vous doucher ou vous changer après une activité physique, privilégiez les sous-vêtements non synthétiques en cas de forte chaleur
  • Lutter contre le surpoids et l’obésité : ce facteur de risque est plus difficile à prendre en charge rapidement. De plus, les traitements chirurgicaux vont compromettre la possibilité d’une perte pondérale car l’activité physique est souvent déconseillée par les soignants. Les traitements mini-invasifs notamment par laser sont particulièrement intéressants dans le cas du patient en surpoids car les activités physiques ne sont pas contre-indiquées après l’intervention.
  • L’épilation est un sujet controversé. Les poils sont à l’origine d’un kyste pilonidal. Leur éviction est probablement intéressante pour limiter le risque de récidive, notamment chez les patients poilus. Néanmoins la littérature scientifique est pauvre sur le sujet, et il est vrai que l’épilation ne protège pas à coups surs d’une récidive, certains corps étrangers venant parfois de plus haut (cheveux, poils du dos). L’épilation définitive par laser est recommandable après la prise en charge d’un kyste pilonidal. Elle doit être réalisée sur toute la hauteur du sillon interfessier (bas du dos, jusqu’à la marge anale), sur 5cm de chaque côté du sillon, en suivant un protocole rigoureux et adapté à la pilosité du patient. Le médecin pratiquant cet acte déterminera ce protocole lors de la consultation de présentation.

2/ Les traitements locaux

L’application d’onguents et cataplasmes serait positive selon certains patients. Il n’y a pas de documentation scientifique prouvant le bénéfice de ces soins. Le produit le plus fréquemment utilisé est l’argile verte.

L’injection d’agents irritants au sein du kyste a été proposée : alcool, henné, phénol. Les résultats publiés sont intéressants et ces méthodes ont l’avantage d’être réalisables sans anesthésie. L’inconvénient est la nécessité de répéter ces injections à intervalle régulier, jusqu’à guérison.

3/ Les traitements chirurgicaux classiques

La chirurgie classique consiste en l’exérèse complète du kyste pilonidal. Il s’agit d’une exérèse large, emportant la peau et les tissus graisseux sous cutanés du sillon inter-fessier jusqu’aux muscles et au plan du coccyx. L’intervention est réalisée sous anesthésie générale, avec intubation oto-trachéale, dans le cadre d’une hospitalisation ambulatoire dans 71% des cas (source VISUCHIR, année 2019). 

La plaie est habituellement laissée ouverte. Des alternatives techniques sont proposées: fermeture partielle de la cicatrice, réalisation de lambeau  pour fermeture complète de la cicatrice, mise en place d’un expandeur cutanée Mid-Sew, mise en place d’un système d’aspiration continu (thérapie par pression négative). Ces techniques de fermeture ont pour but de raccourcir la durée des soins infirmiers à moins de 2 mois

Quelle que soit la technique réalisée, il s’agit d’une intervention à fort impact pour les patients : soins infirmiers quotidiens sur une période longue, arrêt des activités sportives, position assise à éviter pendant plusieurs mois. Les complications infectieuses sont fréquentes, notamment en cas de fermeture de la cicatrice. Les cicatrisations longues (jusqu’à 6 mois) touchent 1 patient sur 5. Une non-cicatrisation peut se produire dans les situations à risque : obésité, tabagisme actif, multiples interventions. Elle peut nécessiter de nouvelles interventions. Enfin, la récidive touche entre 5 et 10% des patients, essentiellement en cas de cicatrisation difficile.

4/ Les traitements chirurgicaux mini-invasifs

A. Le traitement mini-invasif par laser pour les kystes pilonidaux simples

Cette intervention est réalisée avec une philosophie différente de la chirurgie classique. L’objectif est de retirer les corps étrangers (poils, cheveux) et d’obtenir une « soudure » de la cavité sous-cutanée à l’aide du laser.

L’intervention est réalisée sous anesthésie générale de type sédation (pas d’intubation oto-trachéale) dans le cadre d’une hospitalisation ambulatoire. Après infiltration du site opératoire avec des anesthésiques locaux, un ou plusieurs sinus sont dilatés pour avoir accès au kyste. Les poils sont retirés avec des instruments chirurgicaux fins. La paroi du kyste est avivée à l’aide d’une curette. Tous les débris sont retirés. Enfin, le traitement par laser est pratiqué en adaptant le niveau d’énergie à la taille de la lésion, de façon à limiter l’irritation des tissus adjacents.

Après l’intervention, le patient regagne son domicile le jour même. La position assise est possible dès le retour du bloc, grâce à l’anesthésie locale pratiquée. A domicile, le soin principal est réalisé par le patient sous la douche : massage du sillon interfessier pendant 1 minute tous les jours, pour aider à drainer le suintement réactionnel au traitement par laser, éviter la formation de croute sur les cicatrices, et éliminer les poils ou cheveux tombés au niveau du sillon. Un passage infirmier est prévu quotidiennement pour réaliser un pansement simple qui recueillera les écoulements des premiers jours. En l’absence d’écoulement le passage infirmier n’est pas utile. 

Une consultation de suivi est proposée à 1 mois et 6 mois postopératoire, possiblement en téléconsultation pour s’assurer de l’absence de complication et du bon résultat de l’intervention.

Les complications sont assez rares : 

  • problèmes infectieux locaux, favorisés par le tabac, et la non réalisation des auto-massages. Ils sont traités par l’application de compresses d’antiseptiques et/ou une antibiothérapie orale. Si les infections locales se répètent, elles sont le signe d’un mauvais résultat du traitement par laser, et feront discuter d’une réintervention.
  • les douleurs à la position assise prolongée sont plus fréquentes chez les patientes maigres. Elles diminuent dans le temps et disparaissent habituellement en quelques mois. Parfois une simple gêne peut persister.
  • la récidive est évaluée entre 10 et 15%. Ce taux peut être abaissé par le respect des règles hygiène-diététiques. En cas de suspicion de récidive, un bilan est prescrit par le chirurgien pour comprendre le mécanisme. Un nouveau traitement par laser peut tout à fait être réalisé. 

Le travail peut être repris quelques jours plus tard. On conseille un repos sportif d’une dizaine de jours.

B. Le traitement mini-invasif séquentiel pour les kystes pilonidaux complexes

Dans certaines situations difficiles, les traitements chirurgicaux peuvent s’avérer très décevant. Ces situations sont bien connues : récidive de kyste pilonidal après chirurgie classique, suppuration chronique, découverte d’un kyste au contenu purulent le jour de l’intervention. Elles ne sont classiquement pas éligibles à un traitement mini-invasif. Il est néanmoins possible d’éviter une chirurgie classique, grâce à une stratégie séquentielle comme cela peut être réalisé pour d’autres pathologies telles que la fistule anale. 

Lors de la première intervention, le chirurgien réalise l’évacuation des poils et le curetage et le lavage du kyste à l’aide de 2 mini-incisions. Un drain siliconé souple est laissé en place et va aider à assécher la lésion. Deux mois plus tard, lors d’une nouvelle intervention, le drain est retiré et le traitement par laser est désormais possible. Les suites opératoires de chaque intervention sont identiques.

Le taux de récidive annoncé pour ces situations à risque est de 25%. L’arrêt du tabac est indispensable.

C. Le traitement mini-invasif endoscopique ESPIT

Cette intervention permet l’exploration du kyste en endoscopie. Pour cela une caméra flexible miniaturisée est introduite dans le kyste via une incision. Des instruments introduits par le canal opérateur de l’endoscope permettent le retrait des poils, et l’avivement de la paroi. Cette procédure est plus complexe à réaliser que le laser. Elle offre des résultats aussi intéressants que le laser en terme d’impact. Les résultats à long terme n’ont pas été comparés entre les 2 techniques. Dans notre expérience, cette technique pourrait avoir un intérêt pour les kystes assez larges et multiramifiés, pour s’assurer du retrait complet des poils. Cependant l’exploration est souvent limitée, et cette intervention ne permet pas la « soudure » de la cavité.

 

Faut-il vraiment une opération? 

La décision d’intervenir chirurgicalement pour un kyste pilonidal n’est pas systématique. Les bénéfices et les risques sont évalués en consultation ou téléconsulation, en fonction des symptômes gênants, de l’historique des infections déjà traitées, et de la présence de facteurs de risque de complication postopératoire

Le kyste pilonidal est une pathologie bénigne. En l’absence d’intervention, le risque est la formation d’un abcès. Ce risque peut être considéré comme acceptable chez certains patients à haut risque de complication postopératoire. Même proposée de façon bienveillante, une intervention jugée simple, peut s’avérer parfois plus impactante que la maladie elle-même. Parlez en à votre chirurgien.

Contenu modifié le 18/10/22